CRÉ'ACTION #1 - L'EXPO - MARS 2024
Hervé Yamguen a produit, pour rendre compte de sa sensibilité à la crise anglophone qui sévit principalement dans les deux régions du Cameroun que sont le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, une série de 27 dessins qui ont déjà fait l'objet d'une exposition. Ce sont des dessins pour dire l'horreur et l'innaceptable d'un mal qui éprouve le Cameroun et qui demeure d'actualité. Les attentats, les massacres, les viols, les kidnappings, ainsi que la destruction des biens publics, ont instauré un climat de terreur dans ces deux régions, malgré une forte présence militaire.
Muntu Media revient, ce mois, sur ce travail. Et salue l'engagement de Hervé Yamguen en publiant une sélection de 10 dessins tirés de cette série qui figure l'esthétique sombre d'un univers décadent et dévoré par la violence. Par la sobrieté des formes, le geste graphique de l'artiste force le regard, comme une injonction à voir, à ne pas détourner les yeux. Il impose notre présence à une réalité dépouillée de fioritures qui dit simplement ce que signifie être en guerre. Ce sont des têtes coupées. Des corps ensanglantés. Des cadavres que l'on transporte comme de vulgaires choses. Parce que ce sont de vulgaires choses, dans un écosystème de la vie dévaluée, de vies superflues et dispensables, prises dans l'étau d'une violence indifférenciée où les corps qui pendent, qui gisent, qui saignent n'ont que faire des distinctions catégorielles qui alimentent les débats politiques et télévisés à Yaoundé et à Douala. Ni sécessionniste, ni militaire. Juste des humains, broyés, écrasés par la violence des armes.
À qui appartiennent ces têtes coupées que des bourreaux brandissent comme un butin de guerre? Qui est cette femme nue, couchée, ensanglantée, les jambes écartées, avec un fusil braqué sur son vagin? Ici, le pouvoir de tuer s'accompagne du pouvoir d'humilier et de désacraliser, c'est-à-dire de livrer, dans une indistinction transgressive, le corps des femmes à la vue du tout-venant. Une profanation qui est une ultime atteinte à la vie dans un lieu dystopique. Ce lieu, c'est le Cameroun, figuré ici par ses couleurs et sa carte dans un cercueil, mais encore debout. Comme un espoir. Malgré tout... Il faut apprécier ici le talent de Hervé Yamguen dont le geste articule à la fois des prototypes universels et enracinés dans un lieu historique. On passe ainsi de corps traînés dans une mare de sang, figurant un théâtre d'horreur qui pourrait être partout dans le monde, à une topographie de la violence, plus précise et située, représentée en ses expressions les plus macabres, sous le regard omniprésent de l'oiseau-conteur qui symbolise la démarche esthétique de l'artiste.
Parfait D. Akana
----- Cré'Action Mars 2024----- Expo Hervé Yamguen
----- Cré'Action Mars 2024----- Expo Hervé Yamguen
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